28 mars 2010

Last Chance for Love

Pour commencer, il faut partir de l'origine, il faut partir du titre. Il faut une titrographie, une titrologie. Le film s'intitule en VO : "Last Chance Harvey". Impossible à traduire en Français, à part peut-être par le téméraire : "Dernière chance d'Hervé". Pas très vendeur, de fait. Alors les exploitants Français ont décidé de ne pas le traduire. Seulement, ils ont jugé que le public Français, pas suffisamment familier des patronymes anglo-saxons, n'aurait pas pu comprendre le mot "Harvey". Étonnant, l'un des plus grands commentateurs Français de football s'appelant Harvey Matoux, l'un de nos plus grands chanteurs s'appelant Harvey Villard, il y a aussi le père fascisant de Tintin, et puis quand même un acteur comme Hervé Keitel a fait causer de lui dans l'hexagone. Il ne restait donc plus que trois options : soit "Last Chance Hervé", soit "Last Action Hero", soit "Last Chance for love". C'est ce dernier titre qui l'a emporté à pile ou face. 
 
 
 
 
On pourrait penser que ce film m'aurait attiré grâce à l'empreinte au casting de Dustin Hoffman, le fameux comédien de Danse avec les loups, Dogday Afternoon, Sam je suis Sam, Jerry McGuire, EdTV, ou encore Kung-Fiat Panda dans le rôle de la voix inoubliable de Shifu. Mais pas du tout. Ce qui m'a attiré dans ce merdier, c'est Emma Thomson, que j'aime associer dans mon panthéon personnel à Helen Mirren, ces actrices du siècle des Lumières qui brillent à chaque instant. Aussi, sur l'affiche, Dustin Hoffman ne m'a pas longtemps accaparé, complètement eclipsé par Jenna Elfman au faîte de son âge et de sa beauté. Cependant, une fois retirés les effets de flou photoshopés d'une affiche abracadabrante, désormais placardée dans mon salon, ma déception fut grande face au film, où la performance outstanding de Jenna Jameson ne suffit à percer les ténèbres. 
 
 
 
En tout cas "Last Chance for Hervé" m'a refait penser à une triste anecdote de mon enfance. Une cicatrice que je porte encore en moi. Je devais avoir autour de neuf ans, et mon frère aîné, qu'on appelle "Freak Mind", alors âgé de 13 ou 14 ans, et déjà grand consommateur de pornographie devant l'éternel, unique abonné Canal+ avec une formule restreinte "Premiers Samedis du Mois", pour éviter que je le dénonce aux flics et que je dévoile son petit manège de commerce triangulaire de VHS embaumées, devait faire de moi son complice pornophage. J'ai donc fêté mon passage en CM2 devant un porno crado, et quand je dis le plus crado des pornos il faudrait que vous puissiez me regarder dans le fond des yeux pour piger le sens réel du mot "crado". Il s'agissait d'un film au script assez maigre : une palanquée de scènes "homme/mec" autour de diverses piscines couvertes. Mon frère a profité d'une absence de mon père fouettard en vadrouille derrière la gare, occupé à pousser des wagons (c'est en tout cas ce qu'il nous annonçait à chaque fois qu'il quittait la maison, accompagné d'un rot terrible). Malgré tout, cet épisode glacial de mon enfance reste, en tant que tel, un souvenir unique, et en cela, précieux. Une seule conclusion est sûre : c'est ballot de voir un porno trop tôt. 
 
 
 Last Chance for Love de Joel Hopkins, avec Dustin Hoffman et Emma Thomson (2009)

6 commentaires:

  1. C'est une sorte de "Part 2" à l'article précédent, chose qu'on n'avait si je ne m'abuse pas encore vu ici. Une affichographie suivie d'une titrographie tournées autour d'un thème central peu fringant mais foutrement pertinent lorsqu'il s'agit de relancer un blog qui retrouvera, je l'espère, son rythme d'antan.

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  2. Cet texte est magistral !

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  3. Emma Thomson, "vieillarde" ?? traiteriez-vous un vieil acteur de "vieillard"? ce terme charmant ne semble réservé qu'aux femmes chez vous.

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    1. Je te réponds très tardivement Mafalda : non, nous avons déjà qualifié Michael Caine et son équivalent français, Patrick Chesnais, de vieillards. Et nous les aimons beaucoup tous les deux. Ce mot n'est pas forcément péjoratif dans nos bouches, mais ce n'est pas toujours évident à comprendre. Quelqu'un nous en avait voulu à mort d'avoir qualifié Vincent Lindon de "monument aux morts du cinéma français", alors que dans notre esprit c'était le compliment ultime.

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